
C’est sous le signe de la promenade que le visiteur appréhendera l’exposition. Pour une fois la tête et les jambes seront directement convoquées au pied de la lettre puisque les vélos aux jantes réflexives d’Ann Veronica Janssens nous invitent à transgresser les règles et à faire tourner le pédalier pour découvrir les salles. Le rapport au corps est directement palpable chez Jean Glibert dans son magistral applat rouge traversant plusieurs salles du musée. De haute facture énergétique cette ligne rouge, ceinturée de noir se déploie en oblique et aboutit en cul de sac dans la dernière salle. Une fois atteinte la dernière étape le visiteur vivra la perception trouble et étrange de basculement. Arrivé au dernier palier, on a l’impression de fin de parcours, la surprise est au retour! En revenant sur nos pas on redécouvre le jeu dialectique à trois dans toute son amplitude. La grande ligne rouge oblique en remontant sa course, ceinture intentionnellement la longue verrière de la salle pont dessinée par Pierre Hebbelinck. L’aspect contemplatif sera très vite contrebalancé par l’aspect vivant que dégagent les visiteurs qui pédalent autour de vous. Les vélos miroirs en nous frôlant irradient, l’éclair d’un instant, dans leurs enjoiliveurs un peu de ce rouge énergétique éclaté et en mouvement dans l’espace…
Non loin de la, sous l’intitulé “Quadra”, un autre rapport à l’espace temps est animé par Jef Geys. Dans les jardins du Grands Hornu, l’artiste, récemment disparu, a fait réaliser 8 bacs de plantes qui reprennent en superficies égales de 4m2 le contour de huit pays européens. Ces bacs accueillent des plantes sauvages typiques de ces régions. Une fois dépassé le discours conceptuel, peut-on y entrevoir une métaphore géopolitique qui nous parle de l’absurdité des frontières et de la restauration de la sacralité du monde sauvage (herbier-artiste)? A protéger de toute urgence pour des raisons de survie.
Le thème du recyclage est abordé avec les meubles et installations de Rikkert Paauw qui ne demandent pas de transformation de matière en inventant de nouvelles formes. Le secteur du recyclage dans la construction est abordé avec Rotor une société belge spécialisée dans le reconditionnement de matériaux de construction. Le thème de l’obsolescence programmée et ses dérives est abordé par la présentation de L’increvable, une machine à laver conçue pour durer des décennies. Aux antipodes de ces soucis liés à la longévité, les installations éphémères de Laurent Tixador placent la notion d’urgence sous le signe de l’alimentaire. Cet artiste invité en résidence par le CID, profitant de la structure champêtre du cadre d’accueil nous propose son restaurant pizzeria experimental avec four a bois construit sur place sur la pelouse du parc. Confronté à ses instruments de cuisine de style archaïque, on comprend vite qu’ici c’est le règne de la débrouille et que l’important ne se situe plus dans l’esthétique de l’objet mais dans sa finalité première. Sa machine à faire des spaghettis est une merveille du genre et nous invite à l’action… L’humour est présent également du côté de Mathilde Pellé. D’origine française elle démarre son activité de designer indépendant en 2013. Elle choisit d’investir l’atrium du Mac’s et développe “soustraire, une pénurie” un projet de recherche lié à la soustraction. Une vision du futur ou les principes de confort et de consommation dépendraient directement d’une baisse des moyens matériels: Chaque jour, le citoyen se verrait contraint de restituer à l’Etat 9 kg de matériaux issus de son habitation. L’artiste reconstitue dans l’atrium une chambre à coucher recyclée des années cinquante et s’applique méthodiquement à prélever la matière ornementale des meubles, lit, commode, etc,. Gratter le bois superflu pour ne garder que le strict nécessaire, une opération qui la contraint a poursuivre au jour le jour son labeur d’artisan designer. L’évolution de son travail est à découvrir sur place dans le cadre de sa résidence…
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